Quelques jours pour découvrir Saul Leiter !

Saul Leiter

Il faut s’y précipiter. Car il ne reste que quelques jours avant le décrochage d’une exposition de photos absolument extraordinaire. Ce que j’ai vu de plus beau et de plus stimulant depuis longtemps. J’ai honte d’en parler si tard, mais je n’y ai été que dimanche dernier ; le public, jeune et nombreux, semblait ravi, ébahi devant la beauté des photos de Saul Leiter. L’expo qui se tient à la Fondation Henri Cartier-Bresson (jusqu’au 13 avril : courez-y séance tenante !) a quelque chose d’unique. Au premier étage, les photos en noir et blanc de Leiter ; au second celles en couleurs, toutes réalisées entre 1947 et 1965. Le passage du noir et blanc à la couleur est fantastique, on sent un saut qualitatif, sans pour autant renier la première période. Le monde selon Saul Leiter se présente fragmenté, décadré, parfois flou. Mais ce monde est magique, humain, bouleversant. Et surtout, fugace. Il y a dans le regard de Leiter une humilité incroyable, un sens inouï du cadre, de la lumière, de l’instantané. Cet artiste né en 1923 à Pittsburg, fils de rabbin, s’est d’abord intéressé à la peinture. Sa découverte de la photographie et son désir d’en faire sont liés à sa vision des photos de Cartier-Bresson exposées au MoMA à New York en 1947. Que photographie Leiter ? Des passants, des anonymes, des gens attablés dans des bistrots, des pauvres solitaires dans le métro new-yorkais, des villes sous la neige, des panneaux publicitaires, des signaux urbains, des escaliers en fer, des quais de métro, des parapluies, des pans de murs… Un monde où règne à la fois une grande mélancolie, mais qui se trouve comme revigoré par le regard d’un artisan délicat qui ne se prend pas pour le nombril du monde. « J’ai un grand respect pour le désordre ; le jugement le plus sérieux que je peux avoir sur mon travail, c’est qu’il est inachevé et c’est l’inachevé qui m’attire. » Saul Leiter est un immense photographe doté d’une modestie insondable. Voir ses photographies vous met en joie, on se sent comme soulevé, galvanisé. Car il a aussi le talent de laisser au spectateur le soin ou le loisir de combler cet inachèvement. Même si c’est une illusion…

Adresse de la Fondation Henri Cartier-Bresson : 2, impasse Lebouis, 75014 Paris. C’est ouvert jusqu’à dimanche prochain, de 13h à 18h30. Nocturne demain mercredi jusqu’à 20h30. Ouvert samedi de 11h à 18h45. Catalogue de l’exposition édité chez Steidl, 30 euros.

2 Réponses à “Quelques jours pour découvrir Saul Leiter !”

  1. charles balsan a écrit :

    Bonjour Serge,
    j’apprécie l’engagement de vos propos.
    Nous sommes bouleversés par le prochain hommage que vous allez rendre à Humbert.
    Ce sera un beau moment pour se retrouver.
    amitiés
    charles

  2. Serge Toubiana a écrit :

    Merci pour votre message. J’aurais moi aussi plaisir à vous revoir à l’occasion de l’hommage que nous allons rendre à votre frère, ce cher Humbert Balsan. Amitiés,
    Serge Toubiana