Archive pour le 13.12.2008

Joyeux anniversaire, Monsieur Oliveira!

samedi 13 décembre 2008

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Un saut à Porto, ville où je n’avais encore jamais mis les pieds (honte à moi !). L’occasion est belle : ses nombreux amis célèbrent les 100 ans de Manoel de Oliveira. Chacun sait que le plus célèbre des cinéastes portugais est natif de Porto, ville qu’il a célébrée dès son premier court métrage, Douro, Faina fluvial (1931). Je ne regrette vraiment pas d’être venu. Un grand merci à João Fernandes, directeur du musée Serralves, qui a eu la gentillesse de m’inviter. A peine arrivé, il me fait visiter son musée, magnifique bâtiment moderne, situé dans un parc immense sur les hauteurs de la ville. Jusqu’au 18 janvier 2009 s’y tient une belle exposition consacrée à un artiste espagnol très talentueux : Juan Muñoz. Maria de Medeiros nous rejoint pour déjeuner. C’est elle qui présentera la soirée consacrée à Oliveira, prévue autour de 21H30, en présence du ministre portugais de la culture et de nombreux amis de Oliveira.

Le soir, la cérémonie se déroule dans l’auditorium du musée. La célébration du centenaire de Manoel de Oliveira est un événement très important au Portugal. Une commission nationale a même été mise en place, à l’initiative des plus hautes autorités portugaises. Peu de cinématographies dans le monde ont la chance d’avoir un cinéaste d’une telle envergure, fêtant son centenaire alors même qu’il réalise un nouveau film. La cérémonie qui s’est déroulée hier soir n’avait heureusement rien d’académique. Environ deux cents personnes étaient réunies pour entendre plusieurs discours, de gens très proches du cinéaste. Parmi eux, la belle Leonor Silveira et Luís Miguel Cintra, deux acteurs fétiches de Oliveira ; João Bénard da Costa, président de la Cinémathèque du Portugal (et acteur occasionnel dans plusieurs films du cinéaste) ; acteurs ou collaborateurs de Oliveira ; le président et le directeur du Musée Serralves ; le ministre de la culture qui remit à Oliveira la médaille du mérite… A chaque fin de discours, Manoel de Oliveira, assis au premier rang au côté de son épouse Maria Isabel, se levait tel un jeune homme pour remercier l’intervenant, lui serrer la main, l’embrasser ou lui donner l’accolade. Lorsque vint son tour de parler, il remercia, très ému, toutes les personnes présentes et celles qui venaient de témoigner leur gratitude à son égard. Au magnifique discours de Luís Miguel Cintra parlant avec profondeur de son expérience d’acteur, celui-ci répondit : « L’éclat d’un film, c’est l’acteur. Je n’aurai jamais rien appris aux acteurs. Au contraire, j’ai tout appris d’eux. Cela est vrai du cinéma comme du théâtre. La littérature est au-dessus des autres arts. Le cinéma est le miroir de la vie, la synthèse de tous les arts. La littérature n’a pas de limite. Grâce à des auteurs comme Agustina Bessa- Luís, Camilo Castelo-Branco, Madame de La Fayette ou Paul Claudel, j’ai tenté de transcrire au cinéma la photographie de ce modèle qu’est la littérature. »

En fin de soirée, Maria de Medeiros demanda à tous les collaborateurs de la rejoindre sur scène, ce qui fit un magnifique casting. Oliveira les salua tous, la salle était debout. On apporta un énorme gâteau décoré de cent bougies. Manoel de Oliveira les souffla comme un jeune homme. Puis la salle entière entonna un « joyeux anniversaire » des plus vibrant. Oliveira a donc fêté son centenaire, entouré de nombreux amis. Il le fête au travail, puisqu’il tourne en ce moment même un nouveau film à Lisbonne. Avec déjà d’autres projets en tête, qu’il compte bien entreprendre en 2009. Plus le temps passe, plus il se sent des ailes pour attaquer son deuxième siècle.