Archive pour le 4.10.2008

Biden against Palin

samedi 4 octobre 2008

Hier soir, j’ai regardé dès 21 heures, heure de New York, le débat qui opposait les deux candidats à la vice-présidence américaine. D’un côté la Gouverneur Sarah Palin, de l’autre le Sénateur Joseph R. Biden. C’était un peu particulier. Arrivé à mon hôtel à 19h, je dépose mes affaires et descends illico dans la rue, sur Central Park. Je vais boire un verre au coin de la 6th Avenue. Par la vitre j’aperçois Olivier Assayas, de l’autre côté de la rue, en train de téléphoner. Le hasard fait qu’il est justement en train d’essayer de me joindre. Heureuse coïncidence. Ensemble nous allons retrouver Jean-Pierre Gorin, Kent Jones et d’autres amis. La soirée commence à prendre forme.

Le New York Film Festival (ce pour quoi les uns et les autres nous sommes là) programme à 21h le film d’Olivier Assayas, L’Heure d’été. C’est la deuxième projection du film dans le cadre du festival, la première s’est très bien passée, le film plaît beaucoup (sortie prévue en mars prochain aux Etats-Unis). Pendant la projection, il est prévu que nous regardions en compagnie d’autres amis du festival le fameux débat des colistiers. Générique de l’émission, plan sur la scène vide, les deux pupitres sont placés de part et d’autre. Mise en scène très classique, une journaliste, installée au centre, pose des questions tour à tour à l’un puis à l’autre des deux colistiers. Le thème central concerne l’économie, la crise financière, la guerre en Irak. Temps de parole également répart. Mais l’on note que les premières questions sont posées à Joseph Biden, ce qui laisse à Sarah Palin une minute à peine (de répit) pour caler son speech. Elle regarde fixement la caméra, comme une automate, tandis que Joseph Biden s’adresse à la journaliste (regard en biais). Il mettra du temps à modifier l’axe de son regard, pour s’adresser directement à la caméra, cet œil froid par lequel des millions et des millions d’Américains sont pris à témoin. Sarah Palin, à force de regarder fixement la caméra, dégage quelque chose de scolaire ; elle sourit à peu près tout le temps, mais son sourire n’a rien d’engageant. Elle semble demander par avance qu’on l’excuse, au cas où sa langue fourcherait ou si elle venait à mal prononcer le nom d’un dirigeant étranger, ou même d’un commandant militaire américain en Afghanistan (ce qu’elle fit !). Toute sa stratégie consiste à éviter les faux-pas. Elle y parvient semble-t-il, et c’est tout le sens de sa campagne sur le thème : je suis une femme simple issue de la middle class, j’élève mes enfants, je dirige un État telle une bonne ménagère, je suis prêt à assumer mes responsabilités au plus haut niveau aux côtés de John McCain…

Voici ce qu’écrit ce vendredi matin le New York Times à la une : « Gov. Sarah Palin made it through the vice-presidential debate on Thursday without doing any obvious damage to the Republican presidential ticket. By surviving her encounter with Senator Joseph R. Biden Jr and quelling  some of the talk about her basic qualifications for high office, she may even have done Senator John McCain a bit of good, freeing him to focus on the other troubles shadowing his campaign. » Sarah Palin a donc sauvé les meubles. Pour le camp républicain, c’est donc une victoire. Pour eux, ne pas perdre équivaut à gagner, c’est dire. Car Sarah Palin a enchaîné bévue sur bévue, ces derniers jours, souvent prise de cours par les rebondissements quotidiens de la crise financière. Pour beaucoup d’Américains, le fait que la colistière de McCain n’ait aucune expérience du monde, qu’elle n’ait à peu près jamais mis les pieds en dehors de son Alaska, puisse devenir la vice-présidente d’un si grand pays, serait purement catastrophique. En face, Joseph R. Biden apparaît comme un bon routier de la politique américaine, élégant et courtois, n’hésitant pas montrer son éclatant sourire. Il manie et surtout martèle des chiffres, attaque la politique de Bush en Irak, au Pakistan et en Afghanistan, en pointant les connivences entre Bush et McCain. Au fur et à mesure que le débat se poursuit, j’ai eu le sentiment qu’il prenait l’ascendant sur elle. Bref, qu’il gagnait aux points. Mais rien n’est fini, il reste encore un mois de campagne avec les élections du 4 novembre. Pour le moment, Barack Obama tient la corde, mais son avance sera-t-elle suffisante ? C’est toute la question. En revenant vers mon hôtel, je croise Pedro Almodovar sur la 6th Avenue en compagnie de son frère AgustÌn et de quelques amis. En pleine forme, il vient de terminer son nouveau film, Los abrazos rotos. Il me promet de venir voir Lola Montès samedi matin.

Qu’est-ce que je fais à New York ? Je réponds volontiers à cette question qu’aucun de mes fidèles internautes ne me pose. Je suis là parce que Lola Montès est présenté samedi 4 octobre au Ziegfeld Theatre, dans le cadre du New York Film Festival. Laurence Braunberger et moi avons d’abord fait un détour par Los Angeles, où le film de Max Ophuls était présenté mercredi 1er octobre dans la magnifique salle de la Directors Guild of America. 300 spectateurs environ. Discours d’ouverture de Michael Mann, puis de Howard  A. Rodman de la Writers Guild, puis de David Martinon, le Consul général de France à Los Angeles. Enfin nous trois : Séverine Wemaere de la Fondation Thomson, Laurence Braunberger (dont le père, Pierre Braunberger, avait acquis les droits du film d’Ophuls en 1966) et moi-même. La restauration de Lola Montès a été possible grâce au concours du Fonds Culturel Franco-Américain, qui recouvre la Directors Guild, la Writers Guild, la Motion Picture Association et la Sacem. A ce titre il était tout à fait normal de présenter le film à la DGA, en avant-première américaine. La meilleure nouvelle, c’est que Lola Montès sort en salle dans une dizaine de villes américaines, et ce, dès le 10 octobre. Le distributeur est Rialto Pictures, qui jouit d’une excellente réputation. Le film sera à l’affiche au Film Forum, une des meilleures salles de NY, pendant quatre semaines. Tout s’annonce bien pour la carrière américaine du film. Je rappelle que Lola Montès sort à Paris le 3 décembre.